La vie de l’assemblage judicieux d’un
tube digestif exigeant, de cordes vocales affûtées et – quand même – d’une
bouche à sourires, occupe un temps non négligeable dans la trop brève journée
du père (c’est-à-dire moi, ceci, bien évidemment, les journées chargées de
l’irremplaçable « môman »). Ce dernier se condamne à se lever bien
avant le coq le moins paresseux pour vaquer à des occupations que le tourbillon
du quotidien relèguerait sadiquement au rang de projets avortés s’il lui venait
l’idée de les pratiquer à des horaires plus supportables : course à pied,
renforcement musculaire (pas musculation, ça c’est pour les jeunes pour qui le
terme arthrose ne fait pas encore partie du vocabulaire), lecture.
Plantons le décor : la nuit est
obscure comme si un poulpe avait craché toute son encre sur la lune (oui,
l’auteur de ces lignes est un grand poète). Le réveil sonne. Une première fois.
Puis une seconde. Puis une troisième (j’ai la chance de posséder une montre
pourvue de sept alarmes. Aucune d’entre elles n’est inutile). Il fait froid. La
tête dans le c… oton (vous avez eu peur hein ?), je m’extirpe de mes
ronflements et des draps « made in Auchan » gorgés de chaleur
humaine.
J’ai les boules.
Je me dirige à tâtons vers la salle de
bain, m’asperge le visage d’eau (glaciale) pour décoller mes yeux (de myope).
Il est 5 h 30. Selon Jacques Dutronc,
Paris s’éveille depuis déjà une bonne demi-heure. Mais pas Port-Vendres. Dehors,
le silence traîne ses semelles de plomb sur les quais. Tout le monde roupille,
même les mouettes. En faisant un effort d’imagination, on entendrait presque les
molécules d’air se frictionner le dos.
Dans l’enceinte familiale, deux bruits ordinaires
emplissent les lieux : le frigo qui ronronne comme un vieux chat fatigué
et perclus de rhumatismes. Et Noé, au fond de son lit, coincé sous un amas de
couvertures. Il n’a rien mangé depuis deux poignées d’heures…
…
Voilà pour le décor. La suite très prochainement…
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