Ah qu’il semble loin le temps où Noé
semblait un frêle esquif flottant dans ce grand océan qu’était la bassine pour
le linge ! Le poids plume (2,6 kg pour rappel) avait depuis peu délaissé le
liquide amniotique du ventre maternel pour plonger fièrement dans ce beau monde.
Depuis, tous les soirs, ses parents, fans d’une hygiène exemplaire, le
trempouillent quelques minutes dans une eau du robinet avoisinant les 37°
(parfois 39° si l’on en juge la couleur écrevisse de Louisiane que Little Noé
arbore de temps à autre avec un air pincé).
Aujourd’hui, plus de sept mois (déjà…)
après sa première immersion, le voilà, tel un Poséidon catalan, dominant les
flots bleus (de la couleur de la mini-baignoire). Depuis quelques jours, il s’y
tient fièrement assis, muscles bandés, regard et sourire du type à qui rien ne
fait peur… mais pas plus de dix secondes s’il lui vient la malencontreuse envie
de lâcher le rebord du réceptacle pour se gratter le pied ou répondre au téléphone (non, pas
de suite).
Le petit bout de chair humidifiée
réalise alors que l’équilibre et la stabilité peuvent devenir aussi éphémères
qu’une belle phase de jeu initiée par l’équipe de France de football contre le
Brésil.
Ces deux qualités essentielles pour tout
bébé qui ne veut pas boire la tasse font alors brusquement place à une panique
silencieuse. La glissade est en cours, la tête manque cogner contre la paroi
(souple, heureusement) de la mini-piscine. Le marmot se débat dans un geyser
d’eau savonneuse, chose étonnante, toujours silencieusement, avec la maîtrise
émotionnelle d’un moine bouddhiste dont les traits du visage resteraient comme
figés dans la cire pendant qu’on lui chatouille la voûte plantaire avec un
tisonnier chauffé à blanc.
Il est temps de sortir Noé de cet
environnement hostile. De toute manière, il n’a plus soif : pendant ses
ébats aquatiques, il a bu deux ou trois gorgées de flotte tiède qui, je pense,
vont l’aider à patienter jusqu’au prochain repas.
Pour l’heure, c’est clair, le gosse n’a
pas le pied marin. C’est mal barré pour qu’il se pacse avec la petite sirène…
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